
Produire sans s'approprier
Agir sans rien attendre
Guider sans contraindre
Voilà la vertu primordiale.
(DAO DEJING, Chapitre 51)
Belle devise n’est-ce pas ? On rigole, mais il faut savoir revenir à l’essentiel. Je me suis lancé dans la rédaction de cette série de trois articles pour vous donner les moyens de concevoir et de réaliser l’installation électrique de votre bac en respectant le minimum des règles qui assureront votre protection (et accessoirement celle de toute votre famille…) aux coûts les plus justes !
Pour éditer ces trois articles, notre ami Denisio m’a questionné dans le but de rédiger un rapide portrait de la bête. Au passage, merci à lui pour tout le travail ingrat qu’il assume : transposer un gribouillage infâme en un article attractif sur Internet, et ce sans rechercher gloire ou récompense… Merci l’artiste !
J’ai donc fendu la carapace auprès de notre ami en évoquant mon investissement personnel dans la lutte contre la famine en Afrique… d’où cette devise, choisie par un ancien élève. Je regrette de ne pas avoir dit tout ce qui m’obsède dans ces problèmes de famines. J’aurais tellement voulu…
"J’aurais tel’ment voulu qu’ensemble on nourrisse
Les Neveux et les Nièces de bonbons au réglisse
Racontant aux enfants les histoires héroïques
De nos combats menés assis sur un cheval.
J’aurais tel’ment voulu qu’on pose enfin nos sac
Puis assis en silence qu’on écoute le tic tac
De l’horloge perdue, celle du Titanic
Qui décompte le temps du dernier festival.
J’aurais tel’ment voulu que les trois mousquetaires
Héros magnifiques, éternels réfractaires
Soient toujours réunis pour défendre la veuve
Embrasser l’orphelin et détrôner les Tsars.
J’aurais tel’ment voulu qu’un soir de Brumaire
Allongés sur une plage, près de l’embarcadère
On refasse le monde avec des lois neuves
Interdisant la faim et tous ses avatars.
J’aurais tel’ment voulu vivre en Éthiopie
Au royaume d’Aksoum faire tourner les toupies
Ou encore Ankara et ses Derviches valseurs
Dont les robes coniques frôlent les belles dames.
J’aurais tel'ment voulu d’un monde apaisé
Où un homme vaut un homme, pas moyen de biaiser
Où un homme vaut une femme, et c’est tout son honneur
Quand il offre son sang pour empêcher un drame.
J'aurais tel'ment voulu savoir jouer du piano
Ou être un vieux crooner, épater les minots
Illuminer les yeux des folles jouvencelles
Se faire pâmer les Mères de paroles phalliques.
J'aurais tel'ment voulu chanter à l'Olympia
Empocher des bravos et même des hourras
Me droguer du succès, le penser éternel
Et terminer ruiné dans des bras sataniques.
J’aurais tel’ment voulu devenir milliardaire
Donner aux malheureux les liasses pécuniaires
Et puis mourir enfin sur une natte Tibétaine
Entouré de mon clan et leurs yeux larmoyants.
J’aurais tel’ment voulu devenir mendiant
Recevoir l’obole des riches commerçants
Et terminer ma vie mis en quarantaine
Sur une ile perdue loin dans les océans.
J’aurais tel’ment voulu terrasser la mitraille
Brûler Acapulco ou bien parler en braille
Aux soldats courageux en train d’agoniser
Qui pleurent leurs Mamans en leur disant adieu.
J’aurais tel’ment voulu devenir immortel
Refuser les amours des belles demoiselles
Manger au Kazakhstan l’hirondelle sacrée
Et boire à Stalingrad les alcools vaporeux…".
Mais bon sang ! Qu’est-ce qui me prend ?! Je vous prie de bien vouloir excuser ces digressions malencontreuses… d’une qualité plus que contestable !... Vite, une ou deux pilules !
Voila ! C’est fait ! J’ai pris trois de ces pilules prescrites par mon médecin. Encore une fois, pardon pour ces rimes approximatives et déplorables… surtout ici, sur Cap Récifal… parce qu’ici, c’est du sérieux ! Du cossu ! Du costaud ! On ne parle que de poissons, d’eau de mer, de coraux ! Pas de blagues, pas d’allusion graveleuse, pas de… bref, que du lourd !
Mais, puis-je ici parler de disette, ou pire encore de famine ? Parce que la famine sévit toujours en Afrique subsaharienne, dans cette large bande constituée du Mali, du Burkina Faso, du Bénin, du Niger (que je connais un peu), du Tchad, du Soudan, de l’Éthiopie et de la Somalie… des pays rongés par les guerres, les sécheresses, d’où ces famines. Peu de gens savent en France qu’en 2015, oui, en 2015, 2,5 millions d’habitants de cette zone ont souffert de la faim…
Si je me permets, ici, sur le site Internet de Cap Récifal, d’écrire ces choses, c’est parce que je suis le président d’une association (BFE, Burkina France Ensemble) qui aide 3 villages Burkinabés (6 000 âmes environ) à ne pas souffrir de la faim… et que nos moyens sont ce que sont les moyens de ceux qui n’intéressent personne : sourires gênés, un peu comme si on avait prononcé des grossièretés ; réponses stéréotypées, toujours polies, mais d’une indifférence crasse ; et puis on passe à autre chose… "Redonne-moi les rillettes Germaines s’il te plait et mets la 2 pour les infos…"… et puis voilà !
Je ne veux pas vous embêter avec mes affaires, ou vous culpabiliser : tout juste vous dire une ou deux bricoles pour essayer de vous sensibiliser "pour de vrai" au problème. Deux adresses Internet : la 1ère Plus de 2,5 millions de personnes menacées par la faim au Niger - Le Monde 18/04/2015 dont vous pouvez lire le contenu et la seconde Toutes les 5 secondes un enfant meurt de faim..... - YouTube 2014, qui se visionne… moins de 10 minutes de votre temps… et même s’il est précieux, une petite dizaine de petites minutes…
Ca y est ? Vous avez lu et visionné ? Édifiant non ? Une année de sécheresse signifie trois cents milles morts de faim ! Une seconde, un million de plus !
En 2011 et en 2012, dans le silence assourdissant des médias français, deux sécheresses redoutables ont sévi au Burkina Faso… sécheresses aggravées par les "Golden Boy" (en français dans le texte) qui jouent sur le grain à la bourse des matières premières : conséquences, les prix flambent et deviennent inaccessibles aux gens affamés…
Distribuer du riz gratuitement est réservé aux starlettes médiatiques ; mais il ne faut pas vraiment connaître le terrain pour adopter cette posture (le sac de riz sur l’épaule devant une cohorte de gosses affamés). Cette solution aggrave le problème car elle ruine les paysans qui ne peuvent plus vendre leurs maigres récoltes ! Très rapidement, ils sont obligés de faire comme les autres : tendre la main pour survivre, avant d’aller gonfler le flot de réfugiés autour des villes.
BFE a des adhérents au Burkina Faso. Nous leur faisons parvenir l’argent nécessaire pour qu’ils achètent le grain aux cours mondiaux et le revendent aux cours locaux pour ceux qui en ont les moyens ou le donnent pour les autres. Cette solution contraignante (car envoyer là-bas des fonds à un coût raisonnable est toute une affaire) permet d’acquérir sur le marché mondial ce qui manque sans ruiner les paysans locaux. Un compte rendu des dépenses est exigé : il faut bien donner un ersatz d’officiel si on veut éviter toutes dérives… C’est avec les larmes aux yeux que j’ai lu le premier de ces comptes rendus : des dates avec à chaque fois la quantité de maïs achetées, le prix au quintal et le prix total ; en bas de page, UNE signature et TROIS empreintes de pouce à l’encre rouge… seule façon pour des Burkinabés, honnêtes mais illettrés, d’engager leur honneur sur un justificatif "officiel" du droit à manger ! Je ne sais pas pour vous, mais je sais que moi, en pareille situation, je serais capable du pire pour nourrir mes enfants… du pire !
En quoi êtes-vous concernés par tout cela ? Car après tout, ceci est affaire de conscience… donc affaire personnelle ! Euh… Ce qui suit est un extrait d’une lettre envoyée à une ancienne collègue qui ne comprenait pas quel était le problème du Niger… et qui s’inquiétait d’une énorme sciatique emmenée avec moi là-bas, à Niamey !
"Comment ? Ma sciatique ? Euh… attends, je compte dans ma tête jusqu’à dix pour laisser passer un peu de temps, histoire de ne pas m’énerver, sous peine de devenir grossier…
Le MONSIEUR s’escrime à t’expliquer une partie de ce qu’il a vu, qui est insoutenable, inadmissible, infâme en ce début de troisième millénaire, à cinq heures d’avion de chez Toi, c'est-à-dire à ta porte ! Une année de sécheresse signifie trois cents milles morts de faim ! Une seconde, un million de plus ! En 2012, ils sortent de trois années successives de sécheresse : en as-tu entendu parler dans la télévision, toutes chaînes confondues, dans les radios, dans les journaux ? Ça va ? Tu n’as pas faim ? Je te parle d’un pays où l’espérance moyenne de vie vaut moins cher qu’un discours à l’O.N.U. pour expliquer le problème, à savoir 42 ans pour les mâles et 36 pour les femmes, un pays qui a du pétrole dans son sous-sol et du minerai d’uranium en pagaille, et dans lequel les gens ne disposent que de bouts d’acacia pour cuire la nourriture… quand il y en a de la nourriture ! Et les bouts d’acacia, ils arrivent la nuit, par convois, tractés par des ânes, des bouts de bois de 60 cm de long pour ne pas tuer l’arbre, des bouts de bois dont la fumée est toxique pour les yeux, surtout les yeux des enfants qui sont pile poil à la bonne hauteur pour finir aveugle ! Un pays où l’eau est rare, très rare, et pour être certain de bien mettre les gens dans la merde, histoire d'être certain qu'ils ne pourront pas relever la tête, polluée l’eau, par des colibacilles mortels pour les enfants ! D’ailleurs, ils tombent comme des mouches les gosses dans ce pays : quatre sur cinq ne passent pas le cap des cinq ans !
Mais je te parle d’un pays où les gens sont gentils, souriants, et qui nous aiment, nous les français… doivent être masos ! À chaque fois que tu allumes une lampe chez Toi, c’est LEUR minerai d’uranium que tu brûles. Sauf que c’est le régime MOINS qui est instauré : acheter le MOINS cher possible LEUR minerai pour faire le PLUS de profits possibles avec TON confort ! Et Toi, tu ne sourcilles même pas ! Tu en mets deux des lampes ! Ça va ? Tu vois clair ?
Qu’est-ce qui est le plus grave : ma sciatique ou la famine ? Il serait peut-être temps que les gens se posent les bonnes questions s’ils veulent apporter les bonnes réponses ! Vas sur Internet et tape famine Niger ou famine Afrique… Tu verras toute l’horreur vécue là-bas, y compris une gamine de trois ou quatre ans qui meurt de faim dans les bras d’une infirmière qui la porte dans ses bras en chantonnant une comptine, en berçant doucement le petit corps décharné, certainement le seul câlin d’une courte vie ! Et puis doucement, les bras se relâchent et tombent lentement de chaque côté du petit squelette… comme ça, en direct devant la caméra ! Ça dure cinq ou six minutes à l’écran. Même mes bons à rien chialaient comme des enfants en visionnant ces images !
A partir de maintenant, tu ne pourras plus jamais dire que tu ne savais pas, que ce n’est pas de ta faute, que… je ne sais quoi…, que tu attends que quelqu’un fasse quelque chose pour aider ! Il TE faut faire quelque chose ! Continuer à vivre comme avant est un crime ! Et un crime, ça se juge !
Quant à ma sciatique, puisque ce sujet t’intéresse au plus haut point, le roulis et le tangage de la selle du dromadaire, additionnés à la chaleur… je ne sais ce qui l’a soignée, mais c’est comme ça que je m’en suis débarrassé : 6 Km de dromadaire. Tien ! Une idée, une idée une simple, une idée bête même, jetée comme ça : que toutes les sciatiques mâles ou femelles de ce pays aillent à Niamey faire du dromadaire et lâcher un peu d’oseille chez les commerçants, chez les artisans, chez les porteurs, chez les guides du W (une réserve animalière) ou des girafes, chez qui ils voudront, du moment qu’ils lâchent un peu d’oseille… Et merde à la FAIM ! … Et oui, je sais que je rêve… Et alors !".
Le Burkina Faso ne possède pas d’énergie dans son sous-sol (contrairement au Niger), n’a pas de bois sur son sol et est touché souvent par la sécheresse. Des alternatives existent : le soleil, principale calamité, peut avantageusement remplacer l’électricité, soit pour cuire les repas, soit pour appertiser des conserves alimentaires de type familiales (bocaux en verre) les années fastes pour surmonter les disettes ou les famines les années noires, soit encore en déshydratant certains légumes et certains fruits.
Cuiseur solaire familial, qui remplace avantageusement le bois. Au passage, il fonctionne très bien sous nos latitudes et si certains doutent de mes propos, les plans sont à leur disposition… contre une petite participation à nos projets.
Séchoir solaire qui déshydrate fruits et légumes, dans le but de les conserver sans utiliser d’énergie.
Pour appertiser des conserves alimentaires, on peut utiliser des panneaux photovoltaïques et des stérilisateurs électriques de 4kW. Mais à ces investissements s’ajoutent les 250 000 bocaux en verre pour tenir les 5 à 6 semaines que dure une disette…
Voila ! C’est fait ! Je ne vous embêterai plus ! Euh… si, une adresse, celle de notre boîte mail : bfe-france@laposte.net ; là vous pourrez nous contacter pour nous aider… un peu… En attendant que notre site Internet existe ; il vous suffit de donner votre adresse Mail pour que nous vous donnions la marche à suivre… et pour ce qui nous concerne, les petits ruisseaux font les grandes rivières.
Pardon pour cette digression et merci à vous toutes et à vous tous de m’avoir permis de "détourner" Cap Récifal pendant quelques minutes.
Jean Pierre DUMAS
Article publié par Cap récifal le 07 novembre 2016.
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