Quand on creuse un peu et que l'on demande à l'interlocuteur de décrire ses paramètres, on s'aperçoit que l'excès de nitrates est souvent lié à une absence totale de phosphates. Dans ces conditions, toute mesure prise pour diminuer le paramètre excédentaire est vaine. Ce phénomène découle de la loi des facteurs limitant de Liebig, popularisée par celui-ci en 1850. La loi de Liebig dit que : "le rendement d'une culture est limité par celui des éléments fertilisants qui le premier vient à manquer (N, ou P, ou K, ou Mg, etc.) et qu'il convient de compenser le manque par un apport sous forme d'engrais minéral, complétant le ou les éléments en quantité insuffisante". Cette loi est couramment illustrée par un tonneau où chaque planche correspond à un élément indispensable (azote, lumière, oligo-éléments, etc.).
Certaines planches sont plus courtes que d'autres et le contenu fuit par la plus courte. La plante n'arrivera pas à se développer de manière optimale tant que certains nutriments sont insuffisants… ». (Wikipedia : Loi de Liebig sur le minimum) Avec le temps, les scientifiques se sont aperçu que cette loi ne s'appliquait pas seulement à l'agronomie mais à tout système trophique et à tous les facteurs écologiques. Le même phénomène se produit dans nos bacs. L'absence d'un élément chimique va entrainer une impossibilité d'utiliser correctement les autres éléments qui se maintiendront à des taux élevés puisqu'ils ne sont pas ou peu consommés. Pire, dans le cas d'un dosage quotidien d'oligo-éléments, ceux-ci pourraient ne pas être utilisés de manière optimale et s'accumuler dans le système.
Il va sans dire que la carence d'un élément aura une répercussion sur tout le système qui ne fonctionnera pas à 100 %. L'absence d'un oligo-élément, par exemple, pourrait voir la consommation de balling diminuer de manière significative. Il convient donc en cas de baisse de consommation de vérifier par un test ICP s'il n'y a pas un élément carencé. Au début de l'article, j'ai décrit une situation où un manque de phosphate inhiberait l'absorption des nitrates mais toute carence des éléments minéraux essentiels pourrait entrainer ce genre de phénomène comme décrit sur le tonneau ci-dessous. Pour le cas de phosphates, il sera toujours possible de l’exporter de manière physico-chimique avec une résine par exemple, mais l’exportation biologique sera limitée. La seule solution pour remédier à ce problème est de rajouter l'élément manquant pour pouvoir faire baisser l'élément en excès et retrouver l'équilibre.
« Cas d’école »
Un jour, un ami a sollicité mon aide car cela faisait deux mois qu’il avait acheté un aquarium complet d’occasion avec le vivant et il n’arrivait pas à baisser ses taux de NO3 qui étaient à 100 ppm. Il s’est d’abord adressé à une animalerie qui lui a conseillé d’installer un réacteur à biopellets. Malgré cela il n’arrivait pas à baisser ses NO3. Il m’a alors contacté pour avoir des conseils. Il m’a alors fourni les paramètres de son eau et le constat d’un taux de PO4 à 0 a confirmé ce que je suspectais. Je lui ai alors conseillé d’acheter une solution d’hydrogénophosphate de sodium ou de potassium et de commencer un dosage. Une semaine plus tard je lui ai demandé comment ça se passait et il m’a répondu que le vendeur lui avait déconseillé cette méthode et qu’il lui avait recommandé du NOPOX (Red Sea NO3: PO4-X) en plus de son réacteur à biopellets, aberrant à mon sens, et que malgré l’utilisation des 2 produits il n y avait toujours pas de baisse. Je lui ai dit de stopper le NOPOX car ça ne servait à rien d’apporter deux sources de carbone. Il est retourné au magasin en disant au vendeur que ça ne marchait pas et qu’il voulait absolument le produit Phosphate plus de chez Colombo. En une semaine, en maintenant son taux de phosphates entre 0,01 et 0,03 ppm, les nitrates sont passés de 100 ppm à 15 ppm. Je savais que ça allait marcher mais j’ai été surpris par la vitesse spectaculaire à laquelle ça a diminué.
Voici le graphique de la baisse des NO3 et le graphique du taux de PO4 en parallèle. On peut remarquer que quand le taux de PO4 baissait, on observait une stagnation au niveau de la baisse des NO3, ce qui confirme l’application de la loi de Liebig dans nos récifs.
Carlos CABRERA
Article publié par Cap récifal le 30 mai 2021 avec l'aimable autorisation de l'auteur.
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